Maux par mots – Marie-Sophie Peytou
L'humeur du temps

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samedi 21 juillet 2018 Art de vivre
Les vacances sont-elles faites pour se vider la tête ? Une petite réflexion comme cela, en passant, pour tous ceux qui ne sont pas encore partis en vacances…

Pour beaucoup de nos contemporains, les vacances, c’est fait…pour ne rien faire, déconnecter avec les soucis, buller et se vider la tête selon une formule peu élégante mais désormais passée dans le langage courant. Les publicitaires ne sont pas en reste : c’est à celui qui proposera le roman de plage ou le film « qui ne vous prend pas la tête », le plat tout prêt pour cuisiner « sans se prendre la tête », les voyages « all inclusive » où tout est pensé à votre place et le club de vacances pour occuper les enfants à votre place (1). Et je ne parle pas des soirées où l’on se lâche, où l’on s’envoie en l’air ou s’éclate, c’est selon !, avec des lendemains un peu glauques, quand on ne sait même plus avec qui l’on a partagé son verre ou son lit !
Outre que le budget vacances prend de plus en plus d’importance dans la vie des individus et des familles, il n’est pas certain que ces vacances leur aient permis de recharger les batteries et de reprendre leurs activités avec enthousiasme à la rentrée.

Loin de moi l’idée de négliger les moments de pure détente; je suis moi-même adepte du bon thriller qui vous fait tout oublier pendant deux heures. Il est bon de laisser tomber les soucis et les préoccupations quotidiennes. Il est bon de savoir se détendre, de mettre entre parenthèse certaines corvées, que ce soit le repassage, la relecture de dossiers ou le respect strict des horaires.
Le problème vient surtout de cet objectif de « se vider la tête », comme si notre intelligence était un obstacle au bonheur. La vie semble coupée en deux : le travail qui vous stresse et vous abrutit…et les vacances qui vous détendent…et vous abrutissent ! De plus, comme la nature a horreur du vide, il pourrait être intéressant de se demander qui va occuper cet espace de cerveau disponible. (2)
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Est-ce que les vacances ne pourraient pas aussi être l’occasion de réfléchir, de façon profonde, de prendre du recul, de cultiver sa vie intérieure ?
Quand on prend le temps de ramasser des mûres en en couple ou en famille pour faire des confitures, on redécouvre le plaisir d’être ensemble et de converser tranquillement. Quand on reste en silence à contempler un paysage, après une longue randonnée, on peut se laisser envahir par une paix profonde, qui est tout le contraire du vide. Quand on pratique une activité artistique, on expérimente le plaisir de créer de la beauté, pour soi et les autres, et d’exprimer des émotions. Et par la lecture d’un ouvrage enrichissant ou l’écoute d’une conférence, on peut redécouvrir le plaisir de penser par soi même et donc d’alimenter sa vie intérieure.
Lorsque je reçois certains couples en difficulté dans mon cabinet, je leur conseille parfois une lecture ou un film qui pourraient nourrir leur réflexion. Certains n’hésitent pas à me répondre qu’ils ne veulent pas d’activités « prise de tête » ! Ils n’ont pas le temps, ils sont trop fatigués pour ça. A ce moment là, je me dis que c’est dommage. Une séance chez une conseillère conjugale, c’est bien, évidemment ! Mais cela ne sert à rien si ce n’est pas intériorisé, complété par une réflexion personnelle. Et cela passe par des moments où l’on essaye de prendre un peu de recul, ce qui est impossible lorsqu’on a la tête vide !
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Profitons des vacances pour redéfinir ses priorités, pour écouter ses vrais désirs et non pas ceux que nous suggèrent les publicitaire à l’affut, pour faire le tri dans les activités qui encombrent la vie quotidienne et empêchent les relations humaines authentiques. Sortir du rythme « métro/boulot/dodo », cela ne se fait pas tout seul, cela demande un réel effort, mais quelle joie profonde lorsqu’on découvre la richesse de la vie intérieure et la possibilité de la partager avec ceux que l’on aime.
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1 « J’adore avoir les enfants, mais pas sur les bras ! » disait un slogan du club Méd. il y a quelques années
2 Le « temps de cerveau humain disponible », selon l'expression formulée en 2004 par Patrick Le Lay, alors président-directeur général du groupe TF1 : « Ce que nous vendons à Coca-Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible »
Une video en prime, pour ceux qui ont le temps...https://youtu.be/VFhuWwi7eGM
 
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