Maux par mots – Marie-Sophie Peytou
L'humeur du temps

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vendredi 1er mai 2020 Art de vivre
les émotions, saison 4 Comme promis, voici deux exemples inspirés par mon expérience professionnelle pour illustrer les propos de la chronique précédente…J'espère que certains se reconnaitront! Pour rappel, si vous n'avez pas envie de relire l'article précédent, voici les 5 façons de se positionner face à une agression: 1 Faire la carpette 2 Attaquer à son tour 3 S'éloigner 4 Se concentrer sur ses besoins 5 Se concentrer sur les besoins de l'autre

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Un enfant de 8 ans rentre très énervé de l’école et envoie un coup de pied à sa sœur avant de monter dans sa chambre en claquant la porte.
Réaction 1 : la maman est blessée de cette situation, elle déteste les disputes et plus encore les coups entre ses deux enfants ; mais elle est épuisée et ne dit rien pour ne pas envenimer l’atmosphère. Encore un épisode qui vient s’ajouter à sa conviction qu’elle a du mal à gérer les relations entre ses enfants. Il y a sûrement quelque chose qu’elle a raté !

Réaction 2 (la plus répandue sans doute) : la maman l’appelle avec colère en exigeant qu’il vienne s’excuser, sans quoi il sera privé de dessert. Je vous laisse réfléchir à la sincérité de la réconciliation (si elle a lieu) ou à l’ambiance familiale dans la soirée, surtout si d’autres membres de la famille s’en mêlent.

Réaction 3 : la maman prend le temps de consoler la petite sœur puis de réfléchir à la situation. En plus de la colère qu’elle a éprouvée devant cet épisode (qui vient s’ajouter à la fatigue d’une journée trépidante), elle se rend compte qu’elle est aussi surprise de l’attitude de son fils. Cela n’est pas dans ses habitudes de se montrer agressif ; est-ce que cette émotion ne cacherait pas autre chose ? Elle se souvient que depuis quelques jours, la mère d’un copain de la classe est gravement malade et que son fils en a souvent parlé. Cela la conduit à envisager la 5ème solution.

Réaction 5 : elle monte dans la chambre de son fils et lui pose une question toute simple : « Comment ça va ? » ou bien « Comment cela s’est passé à l’école aujourd’hui ? ». A ce moment là, le petit garçon éclate en sanglot en disant « La maman de Nicolas est morte ! ». C’est l’occasion de le laisser exprimer son chagrin et son angoisse (les mamans, ça peut mourir !) en essayant de le consoler. Quand il sera calmé, rien n’interdit de poser deux questions toute simples : « Penses-tu que cela va aider Nicolas si tu envoies un coup de pied à ta sœur ? Que penses-tu que nous pourrions faire pour aider ton ami dans ce moment difficile ? »

Je peux vous assurer que ce petit garçon n’aura alors aucun problème pour aller demander pardon à sa sœur, en lui expliquant, avec ses mots à lui, qu’il il n’a pas su comment faire avec sa tristesse et qu’il s’en est débarrassé en la transformant en colère. (voir la vidéo déjà citée https://youtu.be/PC8C89kOxuc ).

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Un jour du mois d’août, après une journée fatigante, une jeune femme rentre chez elle et s’aperçoit que son mari a mal refermé la porte du congélateur en partant travailler le matin. Je vous laisse imaginer la scène…

Réaction 1 : elle pousse un gros soupir et nettoie le désastre en accumulant (intérieurement) ses griefs contre l’incapacité de son mari (et des hommes en général) à gérer le quotidien. Elle s’active un certain temps mais quand son mari rentre à son tour, elle ne dit rien, car elle a horreur des conflits. Elle préfère se sacrifier au bien être commun, comme elle l’a vu souvent faire dans sa propre famille. Cet épisode n’est de toute façon qu’un détail dans la liste des reproches quelle accumule intérieurement.

Réaction 2 : elle laisse tout en plan et quand son mari arrive, elle lui déclare « Quand on n’est pas capable de fermer une porte, on répare ses c…ries ». Celui-ci lui répond sur le même ton, en évoquant la dernière fois où elle a endommagé la porte de la voiture…C’est l’escalade, tandis que le contenu du congélateur continue à dégouliner dans la cuisine.

Réaction 3 : Elle s’assied et contemple le désastre, en prenant conscience de sa fatigue et de sa colère, amplifiée par le fait que durant la journée, une collègue de travail lui a joué un sale tour, qu’elle n’a pas eu le temps de déjeuner et qu’il y a le lendemain une grève des transports. Elle essaye de tirer le fil de tous ces événements qui aboutissent à cette exaspération et qui risquent de se retourner contre son mari, responsable d'un seul événement sur les quatre.

Réaction 4 : Elle décide alors de se concentrer sur ses besoins : elle a d’abord besoin de manger un morceau et de se poser. Il n’y a de toute façon rien à sauver dans son congélateur, et elle a tout intérêt à prendre une bonne douche avant d’attaquer le rangement.
C’est ainsi que lorsque son mari rentre à son tour, elle est -presque- détendue : elle se sent capable de lui faire remarquer sa distraction, sans le rendre responsable des autres facteurs d’énervement de sa journée. Il y a fort à parier que son mari s’excusera de façon sincère et proposera d’assumer le nettoyage. Pourvu qu’elle le laisse faire sans donner de conseils…et l'incident pourra être rapidement oublié!

 
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